trois pannes de VAE en deux ans

Les constructeurs de VAE sont des assembleurs. Ça explique que leurs vélos se ressemblent tous, parce qu'ils ont les mêmes composants. Derby Cycles a son propre ensemble moteur et batterie, Impulse, et le monte, sur ses marques Kalkhoff, Raleigh et Focus. Il monte aussi d'autres systèmes. La fiabilité de telle ou telle marque ne serait en conséquence qu'une affaire d'image. Il n'existe pas de contrôle technique des vélos, donc pas de statistiques sur leur fiabilité (même si celles pour les voitures ont de nombreux biais). Retenons surtout qu'un vélo reste une mécanique, qui n'est pas parfaite (la perfection n'est pas de ce monde), susceptible de tomber en carafe, même si elle coûte cher. Les solutions et innonvations techniques sophistiquées sont légions dans le domaine des VAE, et le recul faible. Les ennuis peuvent donc arriver. En voici des exemples. Evidemment, ceci m'est arrivé avec un vélo qui a roulé. Ceux qui font 1000 km en deux ans peuvent plus facilement n'avoir aucun problème.

Mon VAE est un Kalkhoff i27 DD à système d'assistance Impulse 1, et a connu quelques déboires. Il est ci-dessous à droite. D'après ce que j'en ai lu, la génération suivante Impulse 2 est pire.

Je ne sais pas ce que valent les actuels vélos Kalkhoff qui a renoncé à ses propres systèmes. Moi, j'ai fui, voir en fin de page.

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L'axe arrière du Dual Drive faussé.

Environ un an après son acquisition, apès une crevaison à l'arrière, j'ai remonté ma roue comme d'habitude. Elle n'est pas restée centrée, et la jante venait frotter sur le patin du frein Magura. Dans l'année qui a suivi, ce décentrement s'est reproduit à plusieurs reprises. J'ai toujours remonté et tenté de régler de la manière la plus précautionneuse possible. Lors d'un voyage le long du canal d'Ille et Rance, la roue arrière est sortie à deux reprises de la fourche. Danger grave et imminent, la roue étant alors instantanément bloquée.

La roue arrière a été envoyée à l'usine Sram. L'axe arrière du système Dual Drive aurait été faussé, n'était plus rectiligne (un bon gros axe plein fileté tenu par des vis démontables à la clé de 15). Cet axe arrière a été changé à l'usine. Par précaution, le vélociste a également changé les rondelles et la patte de dérailleur. Sram n'ayant pas respecté le délai annoncé (48 heures), il n'ont pas facturé ce changement d'axe. Le vélociste ne m'a fait payer que la patte de dérailleur (25€).

Sram a fait du travail de cochon lors de cette réparation. Les roulements étaient trop serrés, et la roue tournait mal. Le vélociste a rectifié. La chambre à air était mal remontée, la valve était de travers et insuffisamment sortie. J'ai redressé moi-même. Cette panne sur le Dual Drive aura rendu le vélo indisponible pendant deux semaines (temps de réparation + aller-retour de la roue arrière par transporteur).

La sortie de roue arrière avec un Dual Drive, une panne pas si rare.

Cette panne est peu répertoriée. Néanmoins, j'en ai trouvé trace dans une discussion sur un forum italien consacré aux vélos électriques. Les photos d'illustration montraient le même Dual Drive avec le même cadre que le mien. Le lien vers ce forum est là (c'est en italien, mais on comprend avec les photos) des fois il ne marche pas : http://www.jobike.it/forum/topic.asp?ARCHIVE=true&TOPIC_ID=19920

Donc, je ne suis pas tout seul. Un autre forumeur évoquait le même souci avec un Haibike. J'espérais la question résolue après réparation, et ai eu la déconvenue d'une sortie de roue arrière de la fourche lors d'un démarrage en côte. Donc, rien de nouveau. Les rondelles "universelles" fournies par Sram sont insuffisante pour empêcher la contre réaction au moment où le pédaleur et le moteur s'allient pour envoyer un maximum de couple, et la roue sort.

Les forumeurs italiens utilisent des rondelles anti-rotation avec des oreilles qui viennent se bloquer sur une partie de la patte arrière du cadre. Un ami en a fabriqué pour mon vélo (je suis moyen comme bricolo). Je continue à me méfier, car ce n'est pas parfaitement ajusté et le métal des rondelles n'est pas très rigide. Peut-être qu'un ajustement trop précis transfèrerait la charge sur ces pattes au moment du couple maximal et serait susceptible de briser les pattes. Ce serait encore pire.

Il s'agit d'une erreur de conception, et/ou de liaison entre cadre et axe, avec peut-être une absence de service recherche et développement chez Sram qui roupille sur son acquis de système inventé il y a quinze ou vingt ans, sans se préoccuper des retours. Kalkhoff (Derby Cycles) a sa part de responsabilité, car il n'a pas cherché non plus à solutionner le problème. Je ne suis pas le seul à l'avoir eu. Le Dual Drive n'est pas unique à avoir ces soucis de sortie de roue à cause d'un couple trop important pour la fixation. J'en ai trouvé des traces sur le net à propos des Alfine de Shimano. Le conseil des forumeurs est toujours le même : ne pas faire de tout terrain avec ces boites de vitesse dans le moyeu associées à des moteurs centraux à fort couple. Certes, certes, mais comment faire lorsqu'on est contraint de démarrer en forte pente à un stop par exemple et que le vélo est chargé (ou que le cycliste est plus lourd que la moyenne) ?

Nous (je n'étais pas tout seul) avons confectionné des rondelles anti-couple maison, adaptées aux pattes du cadre, avec des bouts de métal un peu épais, une scie, une perceuse et une lime. Depuis, la sortie de roue ne s'est plus produite, depuis plus d'un an. Je fais plus ou moins 8000 km en une année. Avec un ami allemand, et un autre français qui maîtrise bien l'anglais, nous avons écrit à Derby, groupe qui possède Kalkhoff. Je passe les détails des échanges. Quelques mois plus tard, le vélo va repartir en Allemagne. Kalkhoff suspecte un cadre faussé. S'ils pouvaient me le remplacer... Je remercie la ténacité de mon vélociste et son insistance auprès de Kalkhoff.

Au retour de l'usine, six semaines plus tard : rien. Ils ont mis six semaines pour changer les rondelles. Le seul commentaire, après deux ans de problèmes quand même : "la roue a été remontée en suivant les préconisations du manuel technique". Autant dire que le vélociste ne sait pas monter une roue. Il a apprécié. Moi aussi. Avec un SAV de ce tonneau, on se dit que les constructeurs se moquent du monde et qu'il sont paranos et méprisants. 

La roue-libre du moteur déficiente après les 1300 premiers kilomètres ?

Au bout de 1200 km environ, en redémarrant d'un stop, plus rien en appuyant sur les pédales. Je tournais dans le vide. Je suis rentré à la chambre d'hôte en faisant de la patinette, debout sur une pédale, par des pistes sablonneuses. Après une journée dans le vent de 80 bornes avec bagages. Quelqu'un est venu me chercher en voiture le lendemain matin, j'étais à 70 km de chez moi. Je soupçonne la roue-libre du moteur, sans avoir de certitude. Alors sous garantie, le moteur a été changé en quelques jours. Le coût a été nul pour moi. La nouvelle roue-libre était moins fluide que la précédente. Elle fonctionnait depuis le changement sans me déranger vraiment.

Le moteur encore en carafe au km 12745.

Vers le km 12700, lors d'un départ en voyage en groupe, j'ai fait l'étape la plus courte de ma carrière de cyclo-campeur. 33 km. Depuis le matin, l'assistance me paraissait bien faible, et quelque peu intermittente. Dans un faux-plat montant (1 à 2% de pente), l'assistance est devenue plus faible encore, et insuffisante pour me permettre d'avancer, même à 10 à l'heure. L'assistance demeurait faiblarde et intermittente, deux secondes de fonctionnement, puis 10 à 15 secondes de rien, et ainsi de suite. Nous avons tenté quelques tests : enlever la batterie pendant dix minutes, brancher le chargeur (chez une commerçante aimable), rapprocher le capteur de vitesse de l'aimant de roue. Sans aucun changement. Le tableau de bord n'indique aucun message d'erreur. Je suis rentré en taxi. Et mes copains ont continué leur voyage. Le vélociste a diagnostiqué un problème de moteur. La garantie était dépassée depuis trois ou quatre mois. Il a parlementé avec Kalkhoff. Le constructeur a accepté d'envoyer gracieusement un moteur neuf. Je remercie grandement le vélociste, et Kalkhoff. Le SAV fonctionne, cette fois.

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Trois pannes en deux ans.

Ces trois pannes en un peu plus de deux ans montrent que rien n'est parfait, pas plus un vélo à assistance électrique à 3000 roros qu'autre chose. Je suis soigneux et précautionneux. Ce vélo est entretenu et révisé deux fois l'an. Il n'a jamais subi de chocs. Je roule sur route. Je l'utilise gentiment, en roulant à moins de 17 km/h de moyenne, bien que le chargeant comme une mule, le poids total en charge demeurant néanmoins sous le maximum préconisé par le constructeur.

Les deux intertitres précédents sont en forme interrogative. La cause réelle de la panne ne m'est pas connue. La politique de SAV de Kalkhoff est le changement de bloc-moteur pour l'Impulse. Bosh procède de la même manière. Pendant la période de garantie, ça se conçoit. Il est procédé à un échange standard, et le client est content. Hors garantie, c'est différent. Le changement d'une roue-libre ou d'un capteur de force, en posant par hypothèse que les problèmes venaient effectivement de ces composants, par un mécanicien compétent est a priori moins coûteux pour le client que la substitution d'un bloc-moteur à un autre.

Malgré la progression rapide du marché des VAE (+30% par an en France), les produits ne sont peut-être pas matures, pour des raisons d'erreurs de conception : certaines pièces ne seraient pas adaptées à un usage plus intensif que celui prévu par le concepteur (cyclo camping avec une machine conçue pour des déplacements urbains par exemple) ou pour des raisons de recherche de bénéfice à court terme : les constructeurs vendraient le plus cher possible des produits les moins coûteux possibles. Il est peut-être naïf de croire à l'auto-régulation du marché, tout en émettant l'hypothèse qu'un constructeur, actuel ou à venir, pourrait tailler des croupières aux autres en proposant des produits bien plus fiables, tant pour les systèmes d'assistance que pour les périphériques (roues, axes et roulements, etc.).

Les systèmes d'assistance à moteur central n'en sont qu'aux toutes premières générations, la commercialisation n'a à peu près que dix ans. Les clients actuels (dont moi, pas de bol!) essuient les plâtres. Au vu des problèmes et des retours, si la satisfaction du client est un des objectifs (rêvons un peu), les systèmes pourraient s'améliorer, en performances (la progression du couple moteur et de la capacité des batteries est un enjeu évident en ce moment), et, pourquoi pas, en terme de fiabilité des systèmes d'assistance et de toute la partie cycle. Malheureusement, la durée de vie commerciale de ces moteurs est courte. Plutôt que d'améliorer au vu des retours, les constructeurs mettent sur le marché de nouveaux systèmes.

Ces réflexions sont bien gentilles mais les pannes demeurent très énervantes. Partir en voyage avec les copains et se retrouver planté à mi-parcours de la première étape est passablement frustrant.

Les moteurs Bosh sont les plus connus actuellement. Comme les autres, ils ne semblent pas exempt de défauts. Voici par exemple le témoignage de Luidji76 (Jean-Louis qui habite à La Londe) sur le forum Cyclurba (discussion 17215) qui répond à Zaza ayant eu des soucis de panne électrique sur un Moustache 27/9 Silver, Jean-Louis ayant un Haibike Xduro RX26 : « Code erreur 500, je suis habitué, j'en suis au 4ème moteur en 4250 km... Respectivement 800, 900 et 2550 km pour le 3ème. L'actuel en est à 2700, je croise les doigts… Pas moyen de connaître la raison des pannes, Bosch change sans faire d’histoire, mais quid après la garantie. De + batterie d'origine 6 mois, la suivante 1 an, ils sont en progrès. Et avec ça le chargeur a fait 1 an ½. Bravo la fiabilité Bosch. » Un exemple ne suffit pas pour décrédibiliser un système ou un autre. J'ai connaissance d'exemples inverses de personnes avec des systèmes divers : Panasonic, Bosh ou Impulse qui ont fait des dizaines de milliers de kilomètres sans le moindre souci.

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et quand ça ne marche plus, ça peut toujours servir pour étendre le linge...

Rester chez soi ? Que nenni !

Avec un peu de recul, je constate que :

  •  mon vélo, en 26 mois environ, aura été immobilisé cinq semaines à peu près, soit environ 4% du temps ; énervant, mais pas dramatique, même si une panne tombe toujours mal,
  • le premier moteur aura duré 1300 km, le deuxième 11444,7 km (à peu près), le troisième devrait durer plus de 20000 km...

On se console et on se rassure comme on peut... Je ne vais pas m'interdire mon activité préférée, le voyage à vélo, parce que mon engin n'est pas aussi fiable qu'il serait souhaitable. Un bonne assurance rapatriement, comprenant le retour du vélo au domicile, serait bienvenue, mais il semblerait qu'il n'existe pas de produit correspondant. Ah bon ? Là non plus ? Faudrait voir à développer le commerce et à satisfaire la demande au lieu de battre encore les sentiers déjà battus les gars !

Restent, éventuellement, le transport du vélo par la SNCF http://www.velo.sncf.com/voyager-avec-son-velo/expedier-son-velo/ ou par un transporteur privé pour rapporter le vélo à la maison.

Quelques uns pourraient regretter que ces systèmes à moteur central, notamment ceux à capteur de force (Bosh, Yamaha, Impulse, Shimano...), soient fermés. L'utilisateur ne peut intervenir, sauf à être très compétent techniquement, et à disposer du savoir-faire, des outils et des pièces. Le VAE n'est pas différent des autres technologies qui nous entourent. Je pouvais nettoyer les bougies ou souffler dans le carburateur de ma deux chevaux Citroën, je serais bien incapable de changer une ampoule de phare sur mon Modus Renault. Les engins dont nous nous servons ne sont pas conçus pour être réparables par ceux qui s'en servent. Nous conservons l'image du vélo traditionnel dont la mécanique est relativement facile à appréhender, le VAE est bien plus complexe. Si j'en comprends les principes : batterie, connectique, capteurs, moteur, contrôleur..., en cas de panne, je suis comme une poule devant un couteau.

Les voitures aussi tombent en panne (bien moins souvent quand même), ce que me disait la conductrice du taxi qui m'a ramené de mon plus court voyage. Les machines à laver également, le SAV de Darty fonctionne bien. Bien d'autres objets technologiques ne sont pas en reste, dont les vélos "secs" (sans petit moteur d'appoint), comme les trains, les transformateurs RDF, ou les téléphones portables. Les pannes, ça arrive. Le VAE ne fait pas exception. Je vais donc continuer à voyager à VAE.

9 jours après la 3ème panne, le plaisir de faire du vélo (pourvu que ça dure)

Les différences constatées entre le 3ème et le 2ème moteur sont les suivantes :

  • la roue-libre est bien plus fluide, un petit coup de patte en arrière et le pédalier fait dix tours, quand il n'en faisait que deux au maximum avec le 2ème,
  • le niveau sonore du moteur est un peu plus élevé, le bruit demeure discret,
  • la réactivité de l'assistance est très bonne, au démarrage et à la reprise du pédalage on sent immédiatement l'appoint du moteur, et ça pousse,
  • l'assistance demeure active environ deux secondes après l'arrêt du pédalage, contrairement au 1er et au 2ème moteur,
  • la puissance délivrée est meilleure qu'avec le 2ème moteur, surtout vers la fin de vie de ce 2ème,
  • la consommation, avec des moyens de mesure approximatifs, (segments de la console, diodes de la batterie) demeure équivalente : 4Wh/km à 20 de moyenne en terrain plutôt plat, elle atteint 5Wh par km avec du dénivelé un peu plus conséquent (n'appuyant pas fort, je ne vais pas vite, mais la consommation est basse), elle est de 2 à 3Wh/km à 15 à l'heure de moyenne,
  • je n'ai plus le message qui apparaissait souvent sur la console "vérifier le capteur de vitesse",
  • le message étrange que j'avais au démarrage "notez, prié d'actionner les pédales" a également disparu, le concessionnaire n'a pas évoqué de reprogrammation,
  • la cadence de pédalage affichée sur la console est ponctuellement déroutante, à la reprise de pédalage je vois du 130 ou 150 rotations de pédalier à la minute (rpm) sans lien avec la réalité, cette aberration ne dure qu'une poignée de secondes et l'on revient ensuite dans des valeurs plausibles, proches de celles constatées avec le Rox 8.1,
  • l'assistance améliorée me permet de nouveau de tourner les pédales à l'allure habituelle, soit 80 rpm en moyenne, quand j'étais à 65/70 avec le 2ème moteur, et c'est bien plus confortable.


Ce VAE fonctionne de nouveau correctement grâce au moteur neuf. Je retrouve le niveau d'assistance et les sensations que j'avais avec le premier moteur, avec même il me semble du mieux pour franchir les montées. Un petit moteur d'appoint qui fonctionne, c'est de l'agrément. Un service après-vente qui tourne, c'est au moins aussi bien. Reste quand même à trouver le bon truc pour éviter la sortie de roue, même si, pour le moment, les bricolages maison fonctionnent. 

Histoire de varier les plaisirs (ou les emmerdes?), j'ai (enfin, surtout ceux qui m'ont aidé) monté un kit moteur pédalier Bafang sur un cadre Fahrradmanufaktur Réalisation du projet Fahrradfang . Rien n'étant parfait, je m'attends à de nouvelles aventures. Cette autre machine, basée sur des technologies bien plus éprouvées : un vélo standard à cadre acier et transmission Shimano Deore associé à un moteur central chinois à assistance basée sur les niveaux de puissance (et donc non proportionnel à la force d'appui sur la pédale) a eu zéro immobilisation en 27000 km. J'ai quand même remplacé la jante arrière fendue, et la manette de changement de vitesse. Pour le reste, rien d'autre à signaler que l'entretien standard de la chaîne et la cassette, des patins de freins, des pneus et des chambres à air. Tout est plus simple sur cette machine suivante, et c'est sans doute préférable. Moins smart, peut-être, qu'un "tout cousu" de constructeur, mais rustique, efficace et sans histoires :

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