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Les croix de Tinténiac
Cette sortie en étoile autour de Tinténiac, commune située au centre de la partie nord de l'Ille-et-Vilaine, a déjà été faite l'an passé. Je n'y étais pas, en raison d'un problème de santé. N'étant pas le seul à avoir envie de goûter à nouveau à ce coin de Bretagne, nous y revoilà.
Voilà le schéma de nos pétales. On peut aussi suivre ce lien quatre parcours autour de Tinténiac 35
Le soir du premier jour, nous sommes arrivés. Certains logent en tente, d'autres en chambre d'hôte, les troisièmes en mobile-home. Les premiers et les troisièmes sont au Domaine des Peupliers, un camping privé bien tenu situé quelques encâblures au-dessus du canal d'Ille-et-Rance. Le mobile-home est rapidement devenu notre camp de base et de regroupement. Il est pratique de disposer d'une pièce confortable où l'on peut manger à plusieurs.
Cette première photo a été prise après le premier petit déjeuner, soit le lendemain de l'arrivée. Nous n'en sommes pas (encore?) à nous taper le kil de gros paf au p'tit déj.
Jour 1 Tinténiac, Evran, Léhon, Dinan par le canal
A peine une descente en faux plat plus tard et nous abordions les agréables, tranquilles et sécurisées rives du canal d'Ille-et-Rance, avec ses habitants du cru qui disent bonjour et tiennent leur chien au passage des cyclistes (à défaut de se conformer au règlement qui fixe que les chiens doivent être tenus en laisse), ses écluses avec leurs maisons rénovées et les bourgades typiques qui eurent leur heure de prospérité grâce à ce canal dont voici l'histoire : histoire du canal d'Ille-et-Rance. Les projets datent du XVIIIème, le plus ancien de 1730. Le canal semblait nécessaire à cause des mauvaises routes et des blocus, anglais bien sûr. Le premier coup de pioche a été donné en 1804 à côté de Hédé. Devenu inutile pour le transport, il a été transformé en vaste zone de loisirs, pour les plaisanciers en bateau, et, sur l'ancien chemin de halage, en voie verte pour les marcheurs, cyclistes et cavaliers.
Les photos peuvent être agrandies en cliquant dessus.
Notre parcours du jour nous a mené de Tinténiac au port de Dinan en passant par l'abbaye Saint-Magloire de LéhonLe lieu est magnifique, granitique à souhait, quasiment dans son jus d'époque, et n'est pas encore très couru par les hordes de touristes en cette fin avril. Nous sommes passés par là : La carte est visible en détail en suivant le lien suivant, puis en cliquant sur "mode plein écran" et enfin en zoomant avec la molette de la souris ou les boutons "+" et "-". Ce parcours est également téléchargeable dans un GPS ou une application cartographique de smartphone. aller-retour de Tinténiac à Dinan 75 km. La boucle au retour passe par le Super U. Comment vivre dans l'ouest de la France profonde, en ville ou à la campagne, sans Super U ? Revenons à nos Jacques et nos jardins.Voilà ce que dit le bulletin municipal de Léhon sur le jardin jacquaire. Fais ton choix camarade ! Pas sûr que la visite de ce jardin soit recommandable aux hypocondriaques et autres victimes du symptôme de Münchhausen.La première construction date du IXème siècle. L'abbaye fut reconstruite aux XIIème et XIIIème, et remaniée à plusieurs reprises ensuite. L'église conserve belle allure, et notre compagnon également.
Nous avons connu des cadres moins agréables pour déjeuner. Deux marcheuses pique-niquent derrière nous, on en aperçoit une à droite de l'image. Nous avions engagé la conversation avec un vététiste au moment du regroupement devant l'écomusée de Tinténiac. Cet homme d'expérience a probablement estimé notre allure, et approximativement déterminé notre heure de passage à Léhon. Guidé par nos voix sonores de cyclistes, il est venu nous inviter à prendre le café chez lui. Nous avons été surpris d'apprendre qu'il arrive assez fréquemment que des conflits et même des bagarres éclatent aux écluses, où des premiers de cordée aux magnifiques bateaux rutilants accusent de braves plaisanciers aux modestes esquifs en aluminium d'avoir abîmé leurs signes extérieurs de ruisseleurs.Quelques petits kilomètres de chemin bien cahoteux plus tard, nous voilà au port de Dinan. L'intérêt principal en arrivant est, certes, certes, le port, le rayon d'un pâle soleil, les bateaux, tout ça, mais aussi la patisserie qui propose des spécialités locales au poids, avec une bonne pâte et sucrées juste comme il faut. Je n'ai pas testé le kouign amann de Tatie Jeanne, mais le flar et le fanc sont tout à fait à mon goût.Nous roulons si vite et faisons si peu de pauses que les marcheuses aperçues à Léhon tout à l'heure nous ont rattrapé au sortir de la patisserie. L'une d'elles a proposé de prendre la photo du groupe. Une photographe certainement. Elle a préféré le viseur à l'écran au dos de l'appareil et compris de suite comment utiliser le zoom manuel. Une adepte très probable du réflex. Merci madame. Il manque quand même deux membres. Où étaient-ils ?
Voilà une vue du port sur la Rance depuis l'ouest vers l'est.Le même port vu de l'est vers l'embouchure.Nous ne sommes pas allés visiter la ville ancienne, perchée au sommet de la rue du Jerzual, 507 mètres pavés en forte pente, 75 mètres de dénivelé, soit presque 15% de moyenne. Nous l'avions descendue la fois précédente. Je déconseille, c'est risqué avec des vélos de route chargés (18% maxi), d'autant plus au milieu des piétons. La situation garantissait la sécurité de la ville depuis le port, d'autant qu'une porte fortifiée, toujours présente, gardait l'entrée. Monter et descendre les marchandises par cette rue sans moyens mécaniques devait être très difficile. Nous ne sommes pas montés car il aurait soit fallu faire un détour pour trouver des pentes plus douces et un itinéraire relativement sûr, soit passer par la route à bagnoles où une grande proportion de bagnolards bretons et autres sont particulièrement agressifs. Je continue de m'étonner que les gentils habitants ruraux de l'ouest de la France se transforment en abrutis haineux à l'égard des cyclistes quand ils s'installent derrière le volant d'une automobile à pétrole. Les habitants des grandes villes de l'Ouest sont bien plus urbains.Véronique ne manque pas de panache sur son beau Fahrradmanufaktur T-300 flambant neuf en franchissant le pont ancien. Nos amis allemands font de chouettes vélos de voyage à cadre acier pour des prix raisonnables. Nos amis britanniques aussi, Rigeback par exemple. Que fait l'industrie française ? Des machins en alu avec fourche suspendue inadaptés au transport des sacoches. Leurs cadres en cannettes fabriqués à Taïwan sont, au mieux, assemblés pas trop loin. Beuh. Fahrradmanufaktur et Rigeback font aussi des vélos en alu, mais pas que, et font surtout des vélos spécifiques de voyage à pas (trop) cher. Le Fahrrad T-50 à cadre en cannettes, fourche acier chromoly et pneus ballons (nouvelle mouture, pas anciens 650), est un vélo de ville et de promenade basique et robuste à 700€ environ avec freins hydrauliques. Je ne suis pas sûr que les cadeaux fiscaux et la possibilité de répudier les ouvriers suffisent pour rendre les patrons français intelligents. L'industrie française fait des sacs à main et des parfums, dont je me sers très peu, surtout en voyage à vélo.Le vététiste aimable pourvoyeur de café nous avait indiqué que la piste l'autre côté de la Rance, pour revenir vers Léhon, avait été dégagée des rochers éboulés et refaite à neuf. Le billard était en effet bien plus confortable que les cahots de la rive gauche. Souvent, les collectivités affichent ostensiblement leur financement. Là, rien. On soupçonnera la Région Bretagne qui est en charge des voies d'eau avec des contributions européennes, et, peut-être, un appoint plus local.
Le retour au camp de base était entamé, ce qui ne nous a pas empêché de regarder les oeuvres d'art exposées le long du canal, dont celle qui mange l'âne.
Le couple devant a des mini vélos à moteur roue arrière, bien pratiques pour le transport et découvrir un coin inconnu. Le vélo est en soi un objet suffisamment graphique pour être artistique tel que.
Jour 2 Tinténiac, Plouasné, Bécherel, Hédé-Bazouges
Pourquoi "les croix de Tinténiac" ? Une légende (je n'ai pas retrouvé de source historique bien assurée) dit que les as de l'aviation inscrivaient un symbole sur leur carlingue à chaque victoire sur un adversaire. Un de mes maîtres ès cyclotourisme ironisait sur l'abandon des uns et des autres dans un brevet longue distance ou un voyage éprouvant en faisant semblant d'inscrire une croix sur le cadre de son vélo.Au matin du deuxième jour, l'un d'entre nous a été contraint de rentrer chez lui. La météo s'annonçait franchement maussade et son corps ne voulait plus suivre. La décision était sage, et nous avons évidemment regretté de perdre un compagnon, en espérant le retrouver lors d'une prochaine sortie. Dans un petit sourire intérieur, j'ai quand même dessiné une croix du bout de mon gant sur le cadre noir de mon vélocipède. Nous avions prévu d'aller visiter Bécherel, petite cité de caractère et cité du livre, en passant par là :
On peut agrandir les photos en cliquant dessus.
Le lien vers la carte détaillée et le téléchargement : Bécherel de Tinténiac 53Km ouest Ce n'est pas tout à fait le même jeu qu'hier le long du canal. Le secteur comprend des faux-plats et quelques vraies côtes, ridicules à l'échelle des cols montagneux, mais réclamant quelque énergie pour des habitués de la platitude des bords de l'estuaire de la Loire. Il est tombé 6 mm d'eau entre 11h et 18h, le vent de nord atteignant 45km/h en rafale. Loin de l'apocalypse, mais aussi du grand beau temps. Etait-il vraiment raisonnable et agréable de rouler dans ces conditions ? Il ne pleut pas tout le temps. Il ne fait pas si froid. On a choisi une activité d'extérieur. Le vrai risque est de ne pas faire de vélo, et tout et tout. On se demande quand même un peu parfois ce qu'on fait là...
En haut d'une assez longue montée, nous avons marqué la pause. Les plus prévoyants ont sorti la thermos. Les autres les gâteaux plus ou moins secs. Simple formule, nos sacoches sont rigoureusement imperméables. Le rideau de petites gouttes, à peine qualifiable de pluie, bouche l'horizon. Quand il s'arrête, le cycliste, surtout en groupe, peut être imprudent. Dans cette sorte de tunnel sombre, les essuie-glace en fonctionnement, un automobiliste pourrait ne pas voir des cyclistes plantés au milieu de la route sans réfléchir. "Jamais un pied sur le goudron, sauf au stop et au feu rouge" a dit le Professeur Claude Got, spécialiste de sécurité routière. Il a raison. Il est aussi cyclotouriste.Nous ne sommes pas les seuls à penser que les automobilistes vont trop vite.Aaaaaah ! Un café. Un grand bien chaud pour moi madame s'il vous plait.Mais l'arrêt au bar ne fait pas l'unanimité. Quelques uns préfèrent garder les chevaux. Il ne pleut pas vraiment, quelques gouttes éparses tombent de temps à autre.
Le pique-nique eut lieu en contrebas de Bécherel. Il ne pleuvait toujours pas tout à fait. La vraie pluie qui trempe a commencé à tomber à la fin du repas. J'étais persuadé que le parcours faisait une boucle pour découvrir quelques points de vue et curiosités d'intérêt avant de revenir dans le bourg touristique de Bécherel. Et non. Suivre stupidement un itinéraire conduit à des stupidités. Les brétilliens (habitants de l'Ille-et-Vilaine) composent des itinéraires vélos pas si bêtes en général, quoique indiqués sur le terrain par de petites pancartes toutes semblables et sans aucune indication de direction (faites donc la même chose pour les voitures qu'on rigole), mais là, quand même, passer à côté d'un centre touristique pareil sans passer dedans, c'est à tout le moins curieux. Je ne suis pas pour autant exonéré de ma croyance irraisonnée. En sortant de ce trou près de l'eau et d'un moulin ancien, nous avons grimpé une vraie côte. 14%. Les plus légers et calmement progressifs ne sont pas les plus mal à l'aise dans cet exercice.Prenant enfin conscience de mon erreur, j'ai demandé qui voulait faire demi-tour pour aller visiter Bécherel. Allez savoir pourquoi, nous avons continué notre progression à l'unanimité. Les bourgades sont proches les unes des autres. Nous avons le sentiment d'avancer d'un clocher à l'autre. Celui de l'église Les Iffs, rénové en 2016, vaut un arrêt, d'autant que la pluie n'est pas bien abondante.Le goudron devant la maison en granit n'est pas très traditionnel, mais évite d'avoir à tondre la pelouse. Peut-être que les habitants préfèrent aller faire du vélo plutôt que de passer leur temps dans des occupations domestiques ?On pourrait avoir tendance quand les conditions sont difficiles à s'arrêter peu. Ce serait une erreur. L'activité physique, même d'intensité faible à moyenne, et surtout quand elle dure plusieurs heures, réclame de s'alimenter, s'hydrater et se pauser de temps à autre. Le corps a ses raisons que la raison ne saurait ignorer. D'autant que notre prime jeunesse s'éloigne de plus en plus. La pluie s'intensifiait. Les autres se sont arrêtées visiter les chambres d'hôte de nos camarades. J'ai filé le long du canal pour rejoindre le mobile-home, quand même plus propice à la récupération qu'une petite tente de cyclo-campeur, mais ne relevant pas de la même philosophie. Là, la philosophie, c'était de rentrer à l'abri. On a parfois la philosophie qu'on peut. Je n'ai rien vu des onze écluses d'Hédé-Bazouges. Juste deux grands chevaux sur le chemin de halage qui m'ont parus un peu nerveux. Les jeunes cavalières, voyant mon embarras pour les dépasser, les ont gentiment rangés sur le bas-côté pour me laisser le passage. Merci aimables brétilliennes.
Nous nous sommes retrouvés le soir pour le souper. Nous nous en défendons, mais les rôles sociaux sont profondément imprimés. Sans concertation, les femmes se sont affairées à la vaisselle pendant que les hommes restaient assis à table.
Jour 3 Tinténiac, La Chapelle-aux-Filtzméens, Combourg, Québriac
La dépression d'hier n'était pas achevée au départ du troisième jour. Une belle pluie tombait depuis le milieu de l'après-midi de la veille. Il était donc urgent, en attendant que les autres nous rejoignent, de consulter les prévisions, à l'abri près des machines rouillées destinées à l'écomusée local. Nous avons choisi de croire qu'il ne pleuvrait plus l'après-midi. Foi de charbonnier.
Le chemin de halage s'est avéré très pénible. Nos roues, pourtant pourvues de pneus pas si minces, s'enfonçaient dans l'épais revêtement de sable imprégné de l'eau tombée toute la nuit et qui continuait de tomber sans discontinuer. J'ai connu des montées de col plus faciles. Nous étions collés au tarmac à la vitesse d'un marcheur. Quelle idée du vélo se font les aménageurs ? Quel est le cahier des charges ? Ces parcours devraient être praticables pour les familles, donc des remorques, des tricycles, des tandems, des vélos avec sacoches, des petites bicyclettes d'enfant... Ce sont d'horribles sentiers propres à vous dégouter du vélo pour le restant de vos jours à la première averse. On devrait appliquer la charia des cyclistes aux commanditaires, techniciens, élus, entreprises qui ont conçu, accepté et réalisé une m... pareille ! Déjà qu'ils nous font ou nous laissent des "obstacles" pour nous empêcher d'accéder aux aménagements cyclables avec des vélos, voilà qu'ils nous fabriquent des parcours impossibles le long d'un canal. Je veux bien payer des impôts, mais pas pour des trucs aussi stupides. L'incurie dans toute sa splendeur ! A croire que l'aménagement a été fait en suivant les prescriptions des automobilistes ruraux.
La Région Bretagne est persuadée que les vélos allemands, comme le mien, et donc les vélos de voyage et de promenade, ressemblent à ça. Elle réalise le revêtement des voies vertes en fonction de ce concept finement observé et dûment validé par toutes les grosses commissions.
Nous sommes rapidement sortis du chemin de halage pour reprendre le goudron. Nous sommes montés à La Chapelle-aux-Filtzméens. Au premier abri, un peu plus loin, nous avons grignoté. Deux d'entre nous, qui devaient de toutes façons rentrer au bercail ce jour, ont fait demi-tour pour rentrer au plus court. Nous aurions pu ajouter deux croix sur nos cadres. Un peu de lassitude n'empêche pas la curiosité. Qui donc étaient ces Filtzméens a priori incongrus ? Voilà ce qu'en dit Wikipédia. Erudit mais clair. "Le nom de la localité est attesté sous les formes Capella filii Meni au XIVe siècle, Capella de Filmen en 1516. La Chapelle-aux-Filtzméens fait référence à une chapelle primitive, fondée par des disciples de Saint-Méen, (les Fils de Méen), ou à des moines s’en réclamant. Le 19 janvier 1985, l'orthographe de la commune est modifié de La Chapelle-aux-Filzméens en La Chapelle-aux-Filtzméens. Ce -t- n'est pas étymologique, puisque l'adjonction -aux-Fil(t)zméens renvoie à un fils de saint Méen. Le gentilé est Capelle-Filismontin." Bon, ben voilà, ce sont les fils de Méen. On mourra quand même, mais moins bêtes.
Michel Lefrançois tient au centre de Combourg un commerce des plus intéressants : articles de chasse, cycles, scooters et motoculture. Indispensable à la France rurale. Nous n'étions pas, ou peu, ou plus, sur un parcours balisé et à peine sur un faux-semblant de trace GPS, nous avons donc levé le nez, et sommes résolument entrés dans Combourg, dont nous n'avons guère pris le temps de goûter au charme de berceau du romantisme. Le château vu du parc est pourtant superbe (photo d'archive).C'est ainsi que Jacques a adopté chez le sieur Lefrançois de magnifiques gants orange pour usage d'une tronçonneuse, mais qui protègent aussi les mains les jours de pluie et de froid sur un vélo.Bruno était un peu inquiet. La console C965 de son Bafang n'affichait plus rien, ce qui n'est pas rassurant pour un afficheur. Le moteur d'appoint fonctionnait quand même, sans qu'il soit possible de savoir sur quel niveau de PAS (d'assistance) il était réglé, entre 0 et 9. Cette console, comme le reste, est donné pour un IP65, mais, le vélo ayant passé la nuit sous une bâche déjà mouillée et sous la pluie, la condensation s'est probablement insinuée partout à l'intérieur. De plus, la pluie continue du jour, alors que la console était protégée par un bout de plastique transparent, a possiblement accentué le problème. Partant de cette hypothèse (il en faut une), le plastique de protection mais d'enfermement a été viré, le vélo mis sous le store du bar, le moteur arrêté en débranchant la batterie, la commande de marche-arrêt ne répondant plus, puis, le temps de prendre un café, l'afficheur s'est remis à afficher. Ouf.La pluie s'est arrêtée. Les prévisions n'avaient pas tort. La pluie finit toujours par s'arrêter. Un jour ou l'autre. Le vent encore frais et l'humidité ambiante nous ont incité à chercher un abri plutôt qu'un coin joli malgré la chaude ambiance de fin de marché. Rien de bucolique sous ce préau à proximité des toilettes publiques. Un endroit adéquat pourtant pour mécaniquer un peu et reprendre quelques forces. Il n'était pas question de suivre la trace prévue, qui arrivait le long du canal au sud-est vers Montreuil-sur-Ille puis Tinténiac par le chemin de halage. Il fallait trouver mieux pour achever le parcours sans achever le peloton. La carte permet une vue large et donne de précieuses informations colorées sur la taille, et donc la fréquentation, des routes. Le guidon ayant été changé récemment, le lecteur de carte n'était pas encore bien réglé, il fallait donc en modifier l'inclinaison pour pouvoir lire la carte en roulant. D'où la nécessité de dévisser et revisser quelques bidules qui se dévissent et se vissent.Nous avons improvisé par de petites routes, en mémorisant des noms de lieux-dits mémorisables pour les joindre, tels Travers et Travoux.
Avec ces repères (entourés en rouge sur la photo ci-dessous), on visualise, mentalement, le trajet à accomplir (en bleu). Et on le fait en pour de vrai et en pédalant. Et pis c'est tout. Le surlignement sur la carte date du temps où je n'avais pas de GPS et où j'étais passé par là. Je surlignais en vert le trajet aller, en rose s'il repassait par là au retour et les lieux d'étape avec leur numéro en rouge. J'ai toujours réussi à rentrer chez moi.
Cliquer sur la photo pour l'agrandir.
Bien réglé, on dispose d'un tableau de bord relativement complet. Le GPS aussi est utile, même sans suivre de trace, car il donne des détails précis grâce au fond de carte IGN 25/1000e, et est un super compteur de vélo, en plus des autres. Je pense ajouter bientôt un smartphone et utiliser Osmand. Quant on n'est pas le nez dans le guidon à jouer au musculaire, on a tout le loisir de profiter des informations disponibles. J'ai trop ramé à trouver ma route pendant des années pour ne pas profiter des technologies qui facilitent la vie du voyageur en évitant les agacements superfétatoires (ou "essence faite à Donges" comme on dit chez moi). Tous les trajets ne sont pas aussi simples qu'en suivant un canal ou une rivière. Ces dispositifs nourris font sourire ou effrayent le vulgum pecus qui juge à tort à partir de son expérience réduite de suiveur de flèches ou de trajets toujours répétés à l'identique.Le guidon du vélo commence à ressembler à un tableau de bord d'Airbus. De loin.La suite n'a pas d'histoire. Il ne pleuvait plus. Le cheminement a été trouvé sans soucis. La route était goudronnée. J'ai pris une bonne soupe en arrivant, et une deuxième un peu après.
Jour 4 Tinténiac, Saint-Thual, Bécherel (2ème), Les Iffs
Coup de fil en arrivant au lieu de rendez-vous matutinal. Une chambre à air donnait des signes de fatigue depuis quelques temps, en se dégonflant avec vice et lenteur. Un premier changement de chambre, puis un second, ne vinrent pas à bout du problème. Alors, nous pûmes faire deux croix de plus sur nos cadres car un couple supplémentaire manquait. Nous avions envisagé de suivre le canal en direction de Rennes. Compte tenu de la qualité du revêtement du chemin de halage après la pluie, les trois rescapés convinrent de trouver une autre idée. Quelque peu vexé d'avoir raté Bécherel, nous résolûmes d'y retourner, et d'en revenir par un chemin plus facile et plus court. Ainsi fut dit fut fait.
La carte et le téléchargement du parcours sont là : Bécherel visite depuis Tinténiac 35 ouest
Premier clocher après Tinténiac, celui de Trimer (pas un bled de fainéants). Nous étions sur une autre planète que les jours précédents. What a nice day ! Ah qu'il sont jolis les nuages de mon pays, laï laï laï laï.Ces croix de mission sont fréquentes par ici. Je n'avais pas eu envie d'en photographier les jours précédents.Christine continue de grimper tranquillement partout.La côte n'est pas si courte pourtant. C'est celle qui aboutit au tunnel végétal de l'autre jour.Les services publics sont encore (discrètement) présent à Saint-Thual. On dirait que des R2D2 veillent.
Et le café est ouvert. Dans ce lieu convivial, les femmes, les vieux, les enfants, les hommes, les bébés, les motards, les cyclistes, tous ont droit de cité.Nous avons demandé au patron à quoi correspondait "les classes 7" dont les photos sont affichées au mur. Ce sont les personnes de la commune nées une année se terminant par 7. Par chez nous, les "classes" désignaient les conscrits, c'est-à-dire les personnes nées la même année lorsqu'elles atteignaient vingt ans, âge de la conscription où l'on était appelé pour servir sous les drapeaux. Par extension, une interclasse regroupe les personnes nées une année se terminant par le même chiffre. Ils devraient donc écrire "les interclasses 7". Je crains que si nous l'avions su et fait la remarque, nous serions repartis avec du goudron et des plumes, car les habitants des campagnes n'apprécient guère les pédants. Les pédants et les ignorants nous ennuient également.Dans les (vastes et propres) toilettes, une sculpture encourage à faire pipi assis. Rare.La cheminée rassemble tout ce qui semble faire la vie commune d'ici.Et le centre du bar-tabac-dépôt de pain-jeux de grattage-gaz-épicerie-jeux de salle (baby foot, billard, fléchettes)-galettes sur commande tous les samedis-terrasse à l'arrière-retransmission soirée football... propose les plaisanteries coutumières dans ce type de lieu, qui n'est pas sans évoquer mon enfance. Je ne suis pas très urbain à l'origine. D'après le bulletin municipal de Saint-Thual "Quoi de neuf ?" Jean-Charles a décidé de prendre sa retraite à 60 ans et de mettre en vente le seul commerce de la commune en s'y prenant à l'avance pour qu'il ne disparaisse pas. Puisse-t-il être exaucé. Le bourg de la commune a l'air vivant, pour l'instant. Elle comptait 901 habitants en 1793, jusqu'à 1026 en 1881, puis vint probablement l'exode rural avec une chute à 376 habitants en 1976. Depuis, ça remonte doucement, avec 865 habitants en 2015.La mairie-école rappelle l'importance accordée par les bretons à l'éducation de leurs enfants. On remarquera aussi la très bonne tenue des plantations.
Bécherel cité du livre grâce à Savenn Douar, nous voilà ! En plein milieu du centre cette fois, au pied du donjon, entre atelier de calligraphie et les multiples librairies. Nous avons mangé là, en plein bourg, sur les bancs et AU SOLEIL !
Un sens unique dont on peine à trouver le débouché.Bécherel doit être situé sur quelque promontoire, et offre des panoramas. Cliquer sur la photo pour l'agrandir.C'est confirmé. Vu de plus loin, Bécherel est bien sur une bosse.Pour en sortir, on descend. Méfiance ! L'expérience du cycliste lui apprend qu'après les descentes il y a souvent des montées. Et, en effet...Ayant du temps, du beau temps et des villages tous les cinq bornes, nous avons visité. Cardroc nous apparut d'abord sous la forme de toilettes municipales plutôt propres, avec du papier éponyme (pas propre, enfin si, mais de toilette) et de panneaux d'information. On satisfait d'abord ses besoins puis les nourritures intellectuelles arrivent ensuite.Les bretonnes n'ont plus ce visage raviné par les difficultés de la vie rurale d'autrefois.Et l'on propose aux visiteurs des promenades guidées par GPS.En parlant du XVIIème, les moines de Méen (oui, comme les fils de La Chapelle) vinrent ici pour prêcher, non sans quelque succès. La ferveur religieuse devait être grande alors.En faisant un contrechamp on a vue sur le panneau concernant l'église des Trois-Marie qui a en effet son petit cachet.L'église suivante fut celle des Iffs (rénovée en 1976, faut suivre un peu !), déjà vue mais avec une lumière très différente. Quelqu'un a-t-il un pain de plastic ? C'est pour dégager un boite en tôle qui gâche la vue. Les voitures, ça tue, ça pollue et c'est moche.Et après ? Ce fut le retour à côté de nos voitures (oui, on en a aussi ; un certain nombre de propos qui précèdent sont au second degré) pour y charger les vélos. Sauf que les deux dernières camarades trouvaient qu'il était trop tôt pour rentrer. Alors, elles sont reparties à vélo le long du canal pour y faire un tour ensoleillé, et ont pu ajouter une dernière croix à Tinténiac sur le cadre de leur vélo avec mon départ.