faire l'itinéraire

Avant de partir, il me faut savoir où je vais et par où je passe. Le débutant, pour se rassurer, choisira les itinéraires déjà existants et fréquentés par d'autres cyclistes. A la fin de cette page, je présente quelques liens vers la description de la Loire à Vélo, de Vélodyssée, des EuroVéloRoutes, des Sentiers cyclables du littoral vendéen et des itinéraires vélos dans le Bas-Rhin. Vous pouvez en trouver beaucoup d'autres en faisant des recherches sur Internet. Si vous choisissez de sortir des sentiers battus, que l'on peut battre avec grand plaisir, je vous présente ci-dessous ma manière de le faire, avec des cartes papier ou sur Internet et GPS. Mes méthodes sont issues de l'artisanat antique. On veut aller quelque part et on se trouve l'itinéraire. Sinon, il existe des sites avec des itinéraires semi-fabriqués et des informations plutôt utiles et à jour, comme France Vélo Tourisme. 

Imgp2191 1280x824 L'idée d'un futur voyage germe d'elle-même. Parfois lors de la dernière étape du voyage précédent. Ce qui montre que je ne suis pas saturé. Quelquefois, elle arrive quelque part entre Noël et Pâques. Je ne peux guère être plus précis. Je suis nul en fêtes religieuses.

L'objectif obéit à plusieurs contraintes, dont au premier chef le calendrier. Il doit pouvoir être atteint, voyage de retour compris, en douze à quinze jours à peu près. Une approche en train est possible, théoriquement. En France, qui a testé le service de réservation de la SNCF pour les vélos, et le transport de sa machine préférée dans ce pourtant génial système sur rails, peut être dissuadé. Certains y arrivent quand même. Par principe, je ne fais pas de VTT ni de vélo de course, qui ne sont pas autonomes et impliquent l'usage concomitant d'un véhicule à moteur, fréquemment à pétrole, et pour laisser l'automobile familiale à disposition des autres personnes du foyer. Entendons-nous, je n'ai rien contre aucune catégorie de vélo. Un VTT un peu adapté peut faire un vélo de voyage très acceptable par exemple, avec des garde-boue, des porte-bagages et de l'éclairage. Mais est-ce encore un VTT ?

Ma préparation de l'itinéraire est peut-être trop soigneuse. Besoin de se rassurer, de circonscrire l'aventure ? Je considère plutôt faire deux fois le voyage : une fois sur la carte, et une fois sur la route. Mes voyages sont petits et Joseph Kessel en a fait de grands, ce qu'il écrit me convient néanmoins : "Les grands voyages ont ceci de merveilleux que leur enchantement commence avant le départ même. On ouvre les atlas, on rêve sur les cartes. On répète les noms magnifiques des villes inconnues."

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Nous avons bien de la chance, nous autres les voyageurs à vélo d'en France, d'avoir d'aussi belles cartes, qu'elles soient de l'Institut Géographique National (IGN) ou de Monsieur Michelin. Celles de Monsieur Michelin sont à une échelle qui convient bien au voyage. Les cartes IGN au 100 000ème sont parfaites pour la promenade de proximité à vélo, mais il en faudrait des kilos pour un voyage de deux ou trois semaines. Toutes les routes ne sont pas sur la carte de Monsieur Michelin. Celles qui y sont, et les points de repère indiqués - églises, chapelles, châteaux d'eau, monuments, pylônes, calvaires - sont judicieusement choisis et permettent de naviguer en se trompant rarement. Il n'y manque que les lignes à haute tension. Tant qu'à faire de nous défigurer le paysage, autant qu'elles nous soient utiles au repérage. Les autoroutes et les fleuves et rivières sont des obstacles, et des repères. Se perdre, sans doute, fait partie du voyage, et permet d'avoir la fierté de se retrouver. J'essaie d'éviter cette circonstance, préférant passer un peu de temps à prendre des photos ou à la terrasse d'un café, plutôt qu'à pester à un carrefour improbable.

La nouvelle série des cartes Michelin fait parfois 1/150 000ème et parfois 1/175 000ème. Ces 200 000ème agrandies sont plus lisibles pour les presbytes. Monsieur Michelin est un bon commerçant, il tient compte du vieillissement de la population. Elles sont embêtantes pour évaluer les distances non indiquées sur la carte. J'emprunte souvent des routes sans indications kilométriques, voire sans indications du tout. A l'ère des GPS et applications cartographiques sur smartphones, je garde ma vieille carte et ma petite boussole au fond d'une sacoche. J'ai déjà eu des misères avec l'électronique mais jamais de panne avec la carte et la boussole.

Le zoom progressif est la méthode que j'ai retenue pour définir l'itinéraire. Sur la carte de la France entière, à la règle et au crayon (dit de bois, à papier ou noir selon les régions) je trace une ligne droite entre mon domicile et l'objectif. Le tracé se précise en fonction du relief, je ne suis pas payé plus cher si je franchis des pentes à plus de 10 %, et de points de passage que j'estime nécessaires, de manière essentiellement arbitraire : site, ville, curiosité, etc. La ligne droite peut donc devenir sinueuse. 

La définition des étapes est le second temps, et se fait sur la carte locale. Une étape est la distance que je peux, et veux, accomplir au cours d'une journée entre deux lieux d'étape. Ça peut sembler évident, c'est pourtant là que ça se complique. Au long d'un fleuve, ou au bord de la mer, les campings sont suffisamment rapprochés pour que la longueur de l'étape soit celle définie par le temps que l'on souhaite passer à pédaler dans la journée. Dès que l'on quitte ces zones d'activités touristiques, le terrain de camping se fait plus rare. Son existence, avérée par le guide le plus complet et le plus récent possible, définit plus précisément l'itinéraire.

Je pourrais faire le choix du camping sauvage, dit aussi "bivouac discret" pour faire moins peur au bourgeois qui a horreur des sauvages, des étrangers, des pas-comme-nous. Ça m'éviterait de me creuser le ciboulot sur mes cartes dépliées avec mon guide des campings, ma calculette et mon curvimètre à régler à chaque changement de carte, ou à cliquer sur des sites. J'y ai renoncé pour des raisons d'hygiène. Je me vois mal le soir enrouler la viande couverte de sueur refroidie dans le torchon, et me raser le matin à l'eau de la mare. Le confort et la tranquillité ont fait pencher la balance vers le camping institué. L'âge aussi peut-être ? Le brin de causette avec le tenancier du camping, que mon équipage intrigue presque toujours si je m'écarte d'un itinéraire balisé, fait partie de ma journée. Quoique, les itinéraires vélos se multiplient, les voyageurs à vélo aussi. Je passe moins pour un original, et c'est très bien. L'hébergement à l'hôtel ou en gîte est une autre affaire. Soit on programme tout, mais alors il faut le cas échéant rouler dans des conditions météo difficiles car l'hôtelier attend. Soit on part à l'aventure, avec une liste d'adresses et de numéros de téléphones, en espérant qu'on trouvera un toit pour la nuit. Cette dernière version ne me tranquillise pas, mais chacun fait selon ses espoirs.

Le voyage en étoile, avec des étapes à partir d'un hébergement fixe pendant plusieurs jours obéit aux mêmes principes : longueur raisonnable, usage préférentiel des itinéraires aménagés, points d'intérêt touristiques, lieux de ravitaillement et de repos, etc.

Avant les bidules électroniques, nous nous fiions aux pancartes. Un minimum de mémoire était nécessaire, par exemple pour trouver son chemin entre le Mont-Saint-Michel et Saint-Malo. En réalité, il suffisait souvent de trouver un point de repère : ligne à haute tension, rivière, voie SNCF, route importante, allant sensiblement dans la direction à prendre, et de la suivre plus ou moins. Les humains je crois ont du procéder ainsi depuis des siècles et des siècles.

Imgp2118 851x1280 1Depuis quelques années, je limite mes étapes à 60 kilomètres environ au grand maximum. Je fais souvent moins. 60 km représentent pour moi un peu plus de quatre heures de selle. Comme dit l'ami Alain : "Nous autres, il faut qu'on soit super entraînés pour rouler à quinze à l'heure". J'ajoute "quand tout va bien". Quinze kilomètes-heure avec un vélo chargé, c'est très honorable, et ça me laisse du temps, dans une longue journée commencée dès l'aube, pour flâner, photographier, visiter, causer. J'arrive à l'étape suffisamment tôt pour pouvoir choisir un emplacement au soleil afin de sécher la lessive. Il me reste quelques délais pour me tromper d'itinéraire, faire face à un rarissime problème mécanique ou m'accorder une petite sieste réparatrice, sans m'angoisser sur l'heure d'arrivée. Je fais des voyages d'agrément pendant mes vacances. Je ne passe pas mes journées le cul boulonné sur la selle et les yeux rivés sur le chronomètre. Avec des enfants, les temps de pause et d'occupations récréatives sont à intégrer dans la journée. Vacances et performance riment pauvrement, à moins d'être incapable de s'abstraire du sport, de la performance et de la rentabilité.

Ensuite, carte en main et calculette sous les doigts, je trace mon parcours. Je proscris les routes à grande circulation, sauf obligation absolue, comme le franchissement d'un pont par exemple. Les grandes routes sont la certitude de grandes quantités d'automobiles et de poids-lourds effrénés, de bruits de moteurs, d'odeurs nauséabondes et de danger permanent pour la petite chose fragile qu'est le voyageur à vélo. Je ne prends les routes secondaires que par défaut. Je préfère les petites routes, les routes de traverse, et les itinéraires cyclables, quand ils existent sur mon trajet. Les petites routes sont des promesses de tranquillité, de camionnettes à casquette, de petits bois, de troupeaux de vaches et de champs de maïs ou de colza. Elles sont moins ennuyeuses, moins droites, moins plates que les grandes routes. Elles sont aussi plus proches des hommes et des femmes, qu'ils soient occupés aux travaux des champs ou à la peinture du portail. Leur présence est rassurante, et souvent indispensable pour situer la prochaine supérette pour laquelle les panneaux sont situés sur la nationale et non pas sur le chemin vicinal par où j'arrive. L'emprunteur de chemin vicinal est censé savoir, ou alors il demande. Le chemin vicinal appartient à une autre époque, celle où les hommes se parlaient même quand ils ne se connaissaient pas et ne demandaient pas au smartphone où sont les chiottes les plus proches.

Avec les outils numériques, le voyageur voit sa vie bien facilitée, y compris pour la préparation qui devient beaucoup moins besogneuse qu'elle ne fut. Les fonds de carte de l'Institut géographique national (IGN), du projet Open Street Map (OSM) et de son proche cousin Open Cycle Map par exemple, nous disent à peu près tout sur les routes praticables à vélo. Les algorithmes de traçage permettent de composer rapidement et avec un risque d'erreur faible, mais non nul, des étapes à sa convenance. Les smartphones et autres GPS nous permettent d'emporter nos étapes dans la poche, et nous guident en route. Les plus chenus se plaindront de la modernerie de tels outils. Se maintenir à niveau en faisant l'effort de l'apprentissage est un très bon médicament anti-vieillissement. J'utilise OSMAND, mais aussi AllTrails, Open Runner et un GPS Garmin, et encore Brouter pour le traçage.

On pourra se servir également par exemple du site de Claude Piotte, avec mode d'emploi simple et en français et un bon algorithme de traçage des parcours pour le vélo. J'ai commis quelques exercices pour apprendre à utiliser ce site de traçage et de mémorisation de parcours pour les nuls. Il faut toujours reparcourir en détail une trace avant de la valider. Se retrouver face à la traversée d'une quatre voies encombrée est évitable. Le meilleur site est celui dont on se sert le plus souvent et dont on maîtrise les fonctionnalités. En ce moment, je me sers pas mal de EDP. Il est largement gratuit, et un peu payant pour accéder aux cartes IGN et à quelques fonctionnalités, mais franchement moins coûteux que d'autres sites bien plus marchands. Il n'est pas encombré de publicités nombreuses et d'images de sportives et sportifs et offrant des images de tenues en lycra moulant des silhouettes parfaites aux muscles saillants.

Le progrès faisant rage, je me fais à présent confortablement guider par mon GPS, et/ou par une application sur smartphone. La plupart des sites de traçage et mémorisation de parcours proposent aussi des applications pour smartphone. Je préfère me servir d'OSMand, riche de fonctionnalités avec de belles cartes détaillées et variées, mais réputée comme étant un peu compliquée. Voilà comment s'en débrouiller au moins au début OSMand utilisation basique. Je conseille sans barguigner de consulter les tutoriels très bien faits de ce site de voyageurs à vélo : Osmand Tutoriels. Mon vélo contient à présent des électrons, et je ne vais pas plus vite. A quoi bon d'ailleurs ? Le voyage à vélo est lent, c'est sa nature.

Copies écran de OSMand sur smartphone.

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Je ne me sers pas des fonctions de guidage sonores, et même pas du guidage visuel. Un peu trop d'assistance et de bruit pour mon goût. Et la batterie de l'appareil est rapidement consommée par l'usage permanent de l'écran. Je me borne à consulter la trace sur la carte de temps en temps. D'autres estiment au contraire être libérés grâce au guidage continu, et rechargent la batterie de leur smartphone avec la dynamo du vélo, ou la grosse batterie du VAE.