Il a fait chaud. Beaucoup semblent craindre la pluie à vélo. L'expérience prouve pourtant qu'il pleut peu, du moins pas souvent, dans les endroits où les gens qui vivent dans des boites (maisons, ateliers, bureaux, bus, voitures...) croient qu'il pleut beaucoup. La chaleur est plus difficile à éviter. Un imperméable ne suffit pas. Tant qu'on est jeune, mince et en bonne santé, ça va à peu près, jusqu'à un certain point. Les autres doivent gérer.
Nous étions assez nombreux pour faire un groupe. Chacun se vêt comme il veut. Chacun vient, chacun s'en va quand il veut. Nous sommes une association de fait comme l'a intelligemment et démocratiquement prévu la loi de 1901, sans nom ni sous. Nous n'en avons pas besoin. Quelques uns se concertent, et invitent les autres. Et voilà. Nous sommes indifférents au sport. Si l'envie prend à l'un ou l'autre de monter une côte très vite, grand bien lui fasse. Comme dans n'importe quel club de soi-disants touristes, qui ne se comportent pas tous comme des gougnafiers.
Tous nos vélos sont confortables : à deux ou trois roues, avec ou sans moteur d'appoint. Certains n'ont pas de pédales (ni de moteur), d'autres sont petits et pliants... Il y en a avec des dérailleurs et d'autres avec des boites de vitesse. Certains ont des sacoches et d'autres des paniers. En voyage, on en voit avec des remorques. Nous n'avons rien à faire de vaines querelles réactionnaires ou progressistes. L'important est le comportement. Nos machines sont assez lourdes, d'autant que nous promenons nos piqueniques voire nos plaids pour la sieste dans les sacoches. Ce ne sont pas des vélos de course, mais beaucoup d'entre nous s'en servent pour faire des commissions dans des magasins de proximité et chez des producteurs.
L'invitation du jour annonçait un passage par des lieux marécageux : château et marais de Goulaine, pont de l'Ouen, plan d'eau du Chêne à Saint-Julien-de-Concelles, avec retour par le pont de Mauves-sur-Loire et l'ancien chemin de halage. Ce qui fut fait. Le parcours NE52 Goulaine Chêne Mauves et son GPX Ne52 l ouen chene mauves (96.96 Ko)
La ville était bien calme au matin. La statue de la Loire saluait les cyclistes.
Le château de Goulaine a été fortifié par Jean 1er de Goulaine, capitaine de la ville de Nantes au 12ème siècle. A la révolution, la bâtisse fut vendue à un armateur néerlandais, Piter Durbroucq, et ne fut pas détruite. Au milieu du 19ème, elle fut rachetée par un de Goulaine et demeure depuis dans la famille. Chaque propriétaire s'efforce de mettre en valeur ce patrimoine, de le conserver en trouvant les moyens de l'entretenir, avec les activités dont disposent les propriétaires privés de ces demeures historiques démesurées, celle-ci était à l'origine une forteresse des marches du duché de Bretagne : salons, expositions, mariages, musées, chambres, visites... Il y faut de la passion et de l'énergie.
Le pont de l'Ouen est antérieur au château de Goulaine, et daterait du 7ème siècle. Une légende implique le diable (il y en a toujours une à propos des ponts et autres moulins) dans sa construction au milieu du papillon des marais. Les Goulaine ont fait beaucoup au fil des siècles pour la mise en valeur du marécage. De nos jours, le syndicat du vignoble organise des expositions à la Maison bleue située près du pont, au centre de la zone humide, site classé et site Natura 2000. Les promeneurs, les familles, les pêcheurs apprécient de profiter des sentiers, des rives et des oiseaux. Nous y avons piqueniqué.
Aux temps chaud, sous les arbres, avec un courant d'air bienvenu, on fait les beaux. En plein hiver, on piquenique quand même, mais on traine moins. Même les vélos sont sous l'auvent.Face à face dans le tunnel cyclable entre le bourg de Saint-Julien-de-Concelles et le plan d'eau du Chêne.
Cet étang est très aménagé : larges sentiers accessibles aux handicapés, parkings, toilettes, parcours de santé, base nautique, terrains de sport et de camping, arboretum, etc. Le site est communal avec des installations du département de Loire-Atlantique. Il fait partie des terres qui ont été gagnées sur la Loire par la construction de la digue les protégeant des crues du fleuve au milieu du 19ème entre l'embouchure de la Divatte, rivière marquant la frontière avec le Maine-et-Loire ex-duché d'Anjou, et Saint-Sébastien-sur-Loire. La prospérité de Saint-Julien est notamment assurée par les exploitations maraîchères installées dans les anciennes prairies inondables et autres boires. Nous avons profité des toilettes et de l'ombre sur le théâtre de verdure.Les groupes de cyclistes ne sont pas beaucoup plus bêtes que les vaches dans les champs. Quand il fait chaud, ils se mettent à l'ombre.Un kilomètre plus loin, nouvelle halte. Les arrêts à l'ombre permettent de se rafraîchir. Nous voilà au pied de la chapelle de Saint-Barthélémy. Ce lieu aussi est historique. Vélo et patrimoine font bon ménage. La chapelle est ancienne, construite sur les ruines d'une maison de bains gallo-romaine. Le pélerinage perdure en septembre chaque année. On y venait contre les maladies de peau, et pour la foire. Cette jolie chapelle du 15ème est entretenue avec soin, à l'intérieur et à l'extérieur. Des fleurs ont été ajoutées dans des jardinières en façade depuis notre dernier passage.Cette chapelle demeure "miraculeusement" ouverte et on peut y admirer la charpente, la statuaire et les vitraux.A l'extérieur, une autre statue de Saint-Barthélémy est située en haut de quelques gradins. Elle est sans doute utilisée lors du pélerinage pour y célébrer des cérémonies à l'extérieur en accueillant bien plus de monde que dans la petit nef. Nous nous en servons pour y déjeuner parfois, car on peut s'y asseoir même en hiver, réchauffé par quelques rayons du soleil et à l'abri des piquants vents d'est.La représentation de Saint-Barthélémy est assez surprenante pour nous. Il était un des apôtres dans l'évangile. Bien que les récits des historiens diffèrent, il pourrait avoir été crucifié et décapité, mais surtout écorché vif. On notera que ces supplices abominables n'ont pas arrêté l'expansion de la religion chrétienne, pas plus que la peine de mort ou les peines de prison alourdies ne dissuadent. Ce saint chrétien est le patron des bouchers, des tanneurs et des relieurs ! Ses attributs sont le couteau et sa propre peau... Brrrr. Il est donc souvent représenté un couteau à la main, comme à l'extérieur, et aussi à l'intérieur.
Encore quelques encablures et nous voilà au bord du fleuve, de l'autre côté des ponts de Mauves-sur-Loire, heureusement rénovés par des passerelles en encorbellement pour piétons et cyclistes. Aux beaux jours, la guinguette et les parasols renforcent l'agrément des bords de la Loire.Le groupe s'est un peu dispersé sur la fin. Un match à suspense retransmis dans le poste attirait les foules. En traversant Saint-Julien, nous avions remarqué un panneau devant un supermarché "cuisson à toute heure". Nous espérons bien évidemment que nos camarades sont rentrées sans encombre sur le chemin blanc surchauffé et poussiéreux par temps sec où les pierres de la digue renvoient la chaleur vers la piste sans aucun ombrage le long du fleuve. L'affrontement tennistique, entre le jeune, blond, fougueux et beau chevelu et le renard impassible aux cheveux courts et bruns en valait la peine. Le plus patient, robuste et précis a gagné. Comme souvent. Match intéressant.
Belle promenade. Vous pouvez sans doute vous fabriquer son équivalent près de chez vous.