Madame Météo avait promis une température terrifiante (moins je ne sais combien qui, normalement, à l'Ouest de la France, n'existe pas). On avait quand même envoyé l'invitation, parce qu'avec les pluies des dernières semaines, les affections saisonnières, les chutes handicapantes et tout ça, il était quand même bougrement temps de remettre le vélo et le bonhomme dehors. Le parcours prévu était celui-là : E48 Louis XVI deux fois
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L'envie de pédaler était partagée. Il ne faisait pas si froid que ça, bien emmitouflés dans plusieurs couches de vêtements adaptés à la situation.
Le petit matin dominical est souvent l'occasion de rencontres interlopes. Ainsi, deux individus fort louches, vaguement déguisés en cyclistes pour donner le change, assez probablement des ressortissants de quelque pays de l'Est, zadistes ou blackbloqueurs, faisaient le siège d'un distributeur bancaire. N'écoutant que notre civisme, nous les avons dénoncés à qui de droit qui ne manquera pas de donner les suites utiles.
Nous sommes ensuite montés vers une des hauteurs de la ville, où trône la cathédrale. Du parvis, nous avons aperçu la colonne Louis XVI. Une statue de Louis XVI ? Il en reste peu en France. Cinq seraient conservées dans un patrimoine communal selon vendéens et chouans (cette page du site ne semble avoir une visée polémique).Trois sont l'oeuvre du même artiste, Dominique Molknecht. Deux sont situées en Loire-Atlantique. L'une est Nantes, place du Maréchal Foch, que les nantais continuent de nommer "place Louis XVI". Cette colonne et cette statue ont toute une histoire liée à la tourmente de l'époque https://fr.wikipedia.org/wiki/Colonne_Louis-XVI Nous verrons l'autre tout à l'heure.En fait, Louis le seizième est en posture de décollage. Une nouvelle technologie permet de récupérer la fusée de poussée, ce qui est bien plus économique et autorise à la replacer après chaque usage. Du coup, les nantais sont persuadés qu'il s'agit d'une banale colonne cannelée.
Nous avons continué à traverser des quartiers où nous ne nous aventurons guère d'habitude, Saint-Donatien et Doulon, avant d'emprunter les sentiers pédestres entre autoroute, voie de TGV et fleuve du côté de Sainte-Luce-sur-Loire dans le bien nommé parc de la Verdûre.
Les vélos y sont rares, les vététistes n'empruntent pas ces sentiers trop civilisés, et les routiers ne veulent pas salir leurs machines avec un peu de poussière ou quelques gouttes de boue. Ces chemins sont pourtant déjà presque campagnards, et agréables, à condition de respecter une allure lente pour ne pas déranger les jogueurs et promeneurs de toutous. Une heure à peine après le départ, au bord de l'Etang du Plessis, le temps du goûter matinal avec thé et café sortis des thermos était déjà venu. Les gendarmes patrouillaient ostensiblement dans leur puissant Peugeot Partner. Les louches individus vus au centre-ville continuaient à nous accompagner. Ceci expliquant peut-être cela.
L'invitation le disait : "Nous devrions pouvoir déjeuner au soleil et à l'abri du vent au pied de la statue de Saint-Barthélémy près de la chapelle du même nom, avant la grimpette vers Le Loroux-Bottereau." Ainsi fut dit fut fait. Nous avons pris possession de l'espace défini par le petit mur de pierres autour de la chapelle.
Les grandes manoeuvres se sont organisées en vue du pique-nique.
Soudain, dans la quiétude du lieu saint, une explosion retentit. Daech ? Bachar ? Que nenni ! Juste une chambre à air bien (trop?) gonflée et peut-être un peu défectueuse. PIano44 a présenté à l'assemblée le triste résultat. Les spécialistes se sont accordés à penser que les rustines ne suffiraient pas pour réparer.
Eh bé ! Heureusement que chacun-e veille à apporter sa chambre à air de rechange. Notre camarade a bénéficié d'un coup de main bienvenu, et de la clé de 15 tirée d'une autre sacoche.
Fort satisfait du résultat, le réparateur entamait derechef une danse digne de Béjart revisité hip-hop devant un public fasciné par tant de soupleté et de légéresse.Cet acte II nous rappela l'acte I (ci-dessous) donné au bord de l'Acheneau, sur un dolmen branlant en contrebas de Cheix-en-Retz. Le moon walk d'alors balbutiait à peine.
Barthélémy sembla pour sa part penser que la séquence aurait pu être coupé et le fit savoir.La chapelle compte deux statues de Saint-Barth. L'une en extérieur, sur une sorte de terrasse où nous avons déjeuné. L'autre en intérieur est présentée au-dessus. La chapelle demeure ouverte, ce qui se fait rare par les temps qui courent. Put-elle demeurer longtemps à l'écart des malfrats. Le lieu est consacré, porteur d'histoire, de tradition, de croyances et non un lupanar où tout un chacun peut s'agiter le nombril à sa guise.
Cette chapelle fort ancienne, batie sur des ruines d'une maison de bains gallo-romaine du IIIème siècle, était au Moyen-Age le lieu d'un pélerinage, qui existe toujours, et d'une foire, qui a disparu. Saint Barthélémy est le patron des tanneurs, des gantiers et des relieurs. Il avait été condamné à être écorché vif et est souvent représenté avec un couteau. Voilà qui nous paraît étrange aujourd'hui pour ne pas dire morbide. Leur conception du monde n'était pas la nôtre. Le Feu est provoqué par un virus qui se traduit par des boutons de fièvre, autour de la bouche notamment. Les complications peuvent être graves. Elles sont rares. Le plus souvent, les symptomes disparaissent en moins de deux semaines. Le pélerinage fonctionnait...
La température avait remonté. La roue de notre amie était regaillardie. Le vent allait nous pousser. Nous allions pouvoir monter LA côte du jour. 45 mètres de dénivelé quand même. On fait ce qu'on peut.
Toute peine méritant salaire (encore un adage destiné à soumettre les ouvriers au nom d'un principe de morale présenté comme universel), nous allions profiter du parvis de l'église du Loroux-Bottereau pour contempler la deuxième statue de Louis, seizième du nom, et qui, dans notre souvenir, ressemblait à la photo ci-dessous. La commune apporte des précisions à ce sujet http://www.loroux-bottereau.fr/module-Contenus-viewpub-tid-2-pid-62.html Les deux statues en extérieur de Louis le Seizième de la Loire-Atlantique sont des copies. Celle de Nantes est en bronze, a été réalisée par Amédée Menard en 1868, et restaurée fin 2012-début 2013. L'original du Loroux-Bottereau est exposée à l'office du tourisme de la commune. Avec des jarrets aussi impressionnants, le dossard n°16 devait être redoutable au sprint.
La déconvenue fut la palissade grinçante sous l'aigre bise d'est qui bouchait la moitié de la place bien déserte en ce dimanche après-midi. Louis XVI était quand même visible, mais pas encore hissé au sommet de la fusée que l'on aperçoit derrière lui sur le pas de tir. La rénovation passée, on espère que ce sera encore plus joli.
Puis nous avons dégringolé du Loroux par les routes des maraîchers en direction des Pas Enchantés. Les cyclistes ont une sainte horreur des chiens, sales bêtes exagérément bruyantes qui paraissent convaincues que leur devoir ne sera accompli que si et seulement si elles engueulent copieusement les personnes de passage dignement juchées sur de belles bicyclettes, voire tentent de leur enlever des morceaux de viance qui leur sont si précieux pour se mouvoir. Le nom du lieu-dit est donc remarquable.
Le panneau date du temps des panneaux, d'avant les GPS aux écrans minuscules et illisibles au soleil. A l'époque, avec un peu de mémoire, on s'y retrouvait plutôt bien avec ces grands écrans en tôle peinte d'où l'on pouvait réfléchir à la toponymie. On en a entendu dire que lors de l'aboiement du chien, on allait se ravitailler en munitions à l'armurerie avant de se rendre au moulin pour faire subir un mauvais sort au loup. De nos jours, on quitte le rond-point à la troisième sortie. Les cerveaux se rabougrissent.
Nous avons effectué le dernier arrêt, pour le goûter de l'après-midi, à proximité d'une retenue d'eau aménagée en barrant une partie d'un bras de Loire, le Gourdeau, et servant à alimenter les cultures en période sèche. Et dire qu'il y en a qui croient qu'on fait du vélo pour maigrir. Quelle blague.