Au début des temps était la sortie des mimosas
Une tradition est la transmission continue d'un contenu culturel depuis un évènement fondateur ou un passé immémorial (wikipédia dixit).
Notre tradition remonte à la pratique instaurée par un club cyclotouriste local, plus que centenaire, l'Union Cycliste Nantaise (devenu "Atlantique" plus récemment, pour faire UCNA http://www.ucna.fr/cyclotourisme/).
Aux temps immémoriaux donc, ces vaillants cyclotouristes avaient l'habitude de se rendre à l'époque de la floraison du mimosa depuis Nantes jusqu'à l'Île de Noirmoutier, et d'en revenir dans la journée, soit 190 à 200 km à accomplir entre le lever et le coucher, dont une partie matutinale avec des éclairages très approximatifs. Cette "sortie des mimosas" avait lieu, je crois, vers la fin février. Ils me suffirait de le leur demander pour m'en assurer, quelques uns d'entre eux étant encore là pour parler de l'époque héroïque. La douceur du climat de l'île, particulièrement du côté du Bois de la Chaize, permet cette floraison des mimosas parfois dès janvier alors qu'ailleurs l'hiver règne encore. A cette époque, le pont n'existait pas. Il fallait donc bien viser pour prendre le passage du Gois à marée basse, et, selon les heures des marées, partir tôt dans la nuit.
La deuxième version de l'UCNA, que j'ai connue, se faisait en plusieurs groupes. Les plus festifs partaient le samedi, et marchaient dans l'île le dimanche matin. Les conjoint-e-s, les familles et quelques amis venaient eux en voiture, et marchaient seulement (ou pas). L'important était de participer aux moments de convivialité, notamment le repas du samedi soir. Les randonneurs plus jeunes et/ou plus aguerris, partaient sur leurs randonneuses légères de Nantes le dimanche matin, en accédant à l'île par le pont. Il y avait deux groupes parmi eux. Les plus lents démarraient à six heures, j'étais avec eux. Les plus rapides deux heures plus tard. En général, les rapides nous rattrapaient au tout début du déjeuner (oui, oui, sur 90 ou 100 bornes, ça donne une idée de la différence de vitesse entre les deux groupes, mais les plus rapides ne faisaient pas halte à Bois-de-Céné pour le deuxième petit déjeuner, ils filaient par les grandes routes comme une équipe de contre-la-montre). Les trois groupes déjeunaient ensemble le midi, et repartaient ensemble, au rythme des moins rapides, pour rejoindre Nantes à vélo en fin d'après-midi le dimanche.
Au fil du temps, la sortie des mimosas s'est décalée de l'époque de la floraison des mimosas. Elle s'est faite de plus en plus tard dans l'année, puis cette tradition s'est perdue à l'UCNA, faute de participants. J'ai fait une fois le trajet en solitaire et en mémoire. j'ai testé pour vous la sortie de Noirmoutier
Quelques années plus tard, ayant heureusement rencontré d'autres adeptes du cyclo-camping à allure débonnaire, nous avons renouvelé cette sortie. Nous n'entendions pas perpétuer la tradition, qu'à part moi personne ne connaissait. L'Île de Noirmoutier est un bel objectif, plaisant et attractif, tradition ou non. Tradition que nous perpétuons quand même.
Faire 100 km avec un lourd chargement était une première pour la majorité d'entre nous. La première fois, nous sommes allés d'un trait de Nantes au bois de la Chaize, avons été rejoints par un autre groupe le jour suivant pour faire le tour de l'Île à vélo, et les cyclo-campeurs sont rentrés le dimanche en passant par le Gois. Il fallait oser ces cent bornes en guise d'apéritif. Tout s'est très bien passé.
Les fois suivantes, le groupe des cyclos-campeurs était plus réduit, et peu de personnes nous ont rejoint pour le tour de l'Île. Nous allons de Nantes à l'entrée du pont, où nous campons à l'issue de ces 75 km environ. Nous faisons le tour de l'Île le lendemain. Nous replions les tentes le matin du troisième jour et rentrons à Nantes tranquillement le soir, en général un dimanche du mois de mai où certains week-ends durent trois jours. Une belle habitude (tradition ?), d'où les mimosas ont disparu, était re-née. L'année dernière : à l'île nous allons
Et cette année :
1ère journée : de Nantes à Notre-Dame-de-Monts, au pied de Noirmoutier
Les photos peuvent être vues en plus grand en cliquant dessus.
Le vélo de Catherine était chargé comme jamais il ne le fut auparavant pour sa première expérience de sortie à vélo en camping.
Au départ de la Place Royale, il faisait beau... ...ou presque.
Quelques un-e-s des protaganistes de cette histoire.
Habituellement, nous passons par Laval (pas au Canada ni en Mayenne, juste un lieu-dit homonyme) mais cette fois par la départementale 64 car une rumeur nous avait alerté sur la présence possible d'un pitt-bull dans ce secteur de Laval que nous avons donc évité.
Du pareil à Saint-Même, où nous fîmes notre halte habituelle dans le parc au bord du Tenu, qui offre bancs et tables, mais où les poubelles ont disparu et les toilettes étaient fermées, au dam des dames.
Christine et moi, Grands Spécialistes (auto-proclamés) ès Pause Café, avons déniché à Machecoul un bar dont le propriétaire a récemment changé et était ouvert cet après-midi de jour férié. Isabelle, quant à elle, a une tenue raccord avec le décor.
Sur la route de Bois-de-Céné, où je venais passer des vacances pendant mon enfance, nous passons la frontière entre Loire-Atlantique et Vendée. Catherine, qui comprend mieux le gallo que le parlange, ne retrouve plus son passeport. Heureusement pour moi, je suis binational.
Manif de nains de jardin à Saint-Urbain.
Après Saint-Urbain, ça rigolait un peu moins. Le gugusse à l'amabilité limitée à l'accueil du camping nous avait répété qu'il fallait ab-so-lu-ment arriver avant 18 heures si nous voulions avoir un branchement. Comme Bruno tient non moins absolument à recharger la batterie de son VAE, il n'était plus question de musarder. Le vent était très contraire, la formation fut concrète sur l'art de s'abriter à vélo, comme le font les canards et les oies lors des migrations. Ce fut également l'occasion de se rendre compte que les gilets rétroréfléchissants fermés par un velcro central ralentissent le cycliste comme un parachute ralentit l'avion à l'atterrissage. C'est bien pour l'avion, nettement moins bien pour le cycliste quand Eole est facétieux. L'équipement de ville peut ne pas convenir à la campagne.
En un tournemain, Michel nous trouva table et chaises pour un dîner grand confort à l'abri du vent.
2ème journée : un tour dans l'Île de Noirmoutier : la chasse aux patates
Au matin du deuxième jour. Chut ! Ils dorment encore. Je vais faire un tour.
Nous sommes bien au bord de la mer, à l'orée de la Forêt de Monts.
Ils ne sont pas encore arrivés. Lors de mon prochain passage, ils seront déjà partis. Voir infra.
Le département de la Vendée adôôôôre proclamer sur chaque panneau, provisoire ou plus définitif, ici et ailleurs, que nous sommes en Vendée. Chacun s'auto-congratule et joue au sponsor avec l'argent des contributions obligatoires. Brassens chantait "les imbéciles heureux qui sont nés quelque part". Ils jouent aussi quelque peu sur la singularité de l'histoire de la Vendée, comme l'atteste le double coeur surmonté de la croix. Je suis vendéen, tendance Clémenceau.
Repus, toilettés, habillés, casqués, fin prêts pour le départ du tour.
Ta ta ta tatata tata (sur l'air du générique de "Thierry la Fronde", en avant pour l'assaut du pont ! A l'échelle de la contrée, un col de première catégorie.
En haut du col, grand bol d'air océanique et photographies.
Chasse aux patates chez un producteur. Les patates en question s'avèreront être bien plus chères qu'au supermarché du coin. Y'en a qui profitent.
Michel garde les chevaux au Super U de Barbâtre. Et heureusement. La sinistre nouvelle vient de tomber sur nos téléscripteurs : un sympathique couple de tandémistes anglais vient de se faire dérober sa monture pendant le petit quart d'heure qu'ils ont passé au supermarché à Pornic. Ils ont pris contact avec Michel sur son blog de Crazyguyonabike. Vélo volé, vacances foutues... On devrait appliquer la charia aux voleurs de vélo. Non bien sûr, mais quand même... Reiser disait qu'il a deux catégories de gens qui nous emm... : les gendarmes parce qu'ils nous obligent à trimbaler des tonnes de papiers, et les voleurs parce qu'ils nous obligent à trimbaler des tonnes de clés. Dur, dur, d'être juste des honnêtes gens.
Jolies lumières noirmoutéennes sur la jetée Jackobsen.
Les cabines de la plage des Dames près du lieu de pique-nique.
La plage de Monsieur Hulot.
Les cyclos campeurs ont quelque chose à voir avec les origines de l'humanité. Ils redeviennent itinérants et chasseurs-cueilleurs le temps d'un voyage, et montent leur hutte chaque soir. En complément de la chasse aux patates, nous (enfin, surtout Isabelle et Michel) avons cueilli des salicornes.
Parfois sportive la cueillette.
Toujours raccord avec le décor. Mais comment fait-elle ?
Sur la digue de l'est, la piste a été rénovée, et les cyclistes sont nombreux à en profiter.
Par dessus la digue, Noirmoutier, c'est beau comme la Somme Avril en Somme
Et le pont fut vaincu pour la deuxième fois.
Vu du pont.
Dans le lointain, les éoliennes de Bouin, qui sont sorties des usines danoises de Nordex. Les habitants de Bouin y sont favorables à 94%. Avancés les vendéens. Installées dans le polder du Dain, dans le marais breton que le Conseil général de Vendée a rebaptisé "breton-vendéen". Et pourtant, il est breton.
Trop tard ! Les gracieux chars à voiles sont redevenus citrouilles, des chariots patauds tirés au bout d'une ficelle.
Jeune couple coloré de charioteurs voileux. Audubon aurait pu en faire le croquis.
3ème jour : de Notre-Dame-de-Monts à Nantes
Les tentes sont pliées. Le soleil mérite bien un salut, d'autant qu'il s'est enfin décidé à chauffer pour de bon.
Schwalbe Marathon Tour Plus. Le pneu increvable. Qu'ils disaient. Celui-ci n'a pas été traversé par quoi que ce soit. Sa trame s'est délitée toute seule au bout de 1250 km seulement, jusqu'à percer la chambre à air. Sur un vélo dont le démontage et remontage de la roue arrière est complexifié par un système Dual Drive, d'autant que l'axe du machin Sram est faussé. Ar zo ! La kalité alemante ! Tu parles Charles... Peut-être ce n'est qu'un avatar d'une mauvaise série.
Merci pour le résultat. Sans oublier que le reste du groupe attend. En fait, elles se sont confortablement calées à la terrasse la plus proche. Le matériel américain, c'est bien aussi. Pour preuve, le patch autocollant à mettre à l'intérieur d'un pneu déchiré de chez Park Tool n'a pas du tout collé. Les emmerd... volent en escadrille disait Jacques Chirac. Michel a sorti de sa trousse un bon vieil emplâtre maison, confectionné à la lime avec un vieux bout de vrai pneu par un des éminents membres du Club Indépendant Bordelais, et ça a pu repartir. Un peu de tradition ne nuit pas à la bonne avancée des choses.
Cliché juste pour la blague. J'ai quand même rapporté mon pneu et mon moyeu arrière chez moi (le moyeu est reparti à l'usine Sram depuis pour dépose et pose d'un nouvel axe, j'espère que la question est définitivement réglée et que je vais pouvoir de nouveau rouler en sécurité).
A la sortie de Châteauneuf, un lieu de pique-nique idéal sous un soleil radieux.
Mais interdit. En étant oiseux, nous prétendrions être des enfants qui nous accompagnons réciproquement. Nous avons vu le panneau après le repas, et personne ne nous a embêté et nous n'avons embêté personne.
Joyeux cadrage final. Après, on est rentrés pépères.
En bonus, les photos de Michel : https://www.crazyguyonabike.com/doc/page/?o=mr&page_id=414818&v=16